Yasmine Abdulhafeez – La Femme dans le Développement et la Paix

 

Le sport au Yémen est un domaine avec une longue histoire, riche en réalisations qui ont touché divers sports, laissant une empreinte claire au niveau local et international. Ces dernières années, le sport féminin yéménite s’est particulièrement distingué, attirant une grande attention et connaissant un développement notable. De nombreux noms de sportives se sont illustrés, créant des succès majeurs et inscrivant leurs noms en lettres d’or dans l’histoire du sport yéménite, aux côtés des réalisations de leurs homologues masculins.

Bien que le Yémen soit un pays conservateur accordant une grande importance à la femme, il a connu une présence féminine notable et visible dans le secteur sportif. Les femmes yéménites ont participé activement à divers événements sportifs locaux et internationaux, remportant des prix prestigieux et participant à des compétitions mondiales, inscrivant leurs noms dans les annales de l’histoire sportive.

 

Des efforts féminins colossaux dans le passé

La journaliste sportive Donia Hussein Farhan met en lumière l’histoire du sport féminin au Yémen, ses débuts prometteurs et ses luttes à travers les âges, dans une déclaration au journal « La Femme dans le Développement et la Paix ».

Farhan indique que les racines du sport féminin yéménite remontent aux années de l’occupation britannique de la ville d’Aden, dans le sud du pays. Cette époque a été marquée par une activité notable dans divers domaines sportifs, les femmes participant à de nombreux sports, notamment la natation, l’athlétisme et le taekwondo.

Elle poursuit en disant : « La participation des femmes yéménites dans le sport ne s’est pas limitée au niveau local, mais s’est étendue à des participations internationales remarquables. De nombreuses athlètes yéménites se sont illustrées dans diverses compétitions régionales et internationales, remportant des médailles d’or, d’argent et d’autres distinctions. Ces réalisations ne sont pas venues de nulle part ; elles sont le fruit des efforts considérables des pionnières, qu’elles soient athlètes ou administratrices, qui ont affronté les défis avec patience et détermination, selon les livres et études historiques qui mettent en lumière ces exploits ».

Elle explique que les débuts du sport féminin au Yémen remontent aux écoles, où certaines activités sportives étaient organisées pour les filles. Avec le temps, les clubs sportifs ont adopté ces activités, qui se sont développées pour inclure divers sports. Cela a rencontré un grand succès et attiré un large public de supporters, contribuant ainsi à renforcer la culture du sport féminin à cette époque.

Elle ajoute : « Les contributions des femmes yéménites dans le sport ne se sont pas limitées à la participation aux compétitions. Des journalistes pionnières se sont également distinguées dans le domaine sportif, contribuant à transmettre les nouvelles du sport féminin au public ».

Quant aux facteurs ayant contribué au développement et à l’essor du sport féminin par le passé, Donia déclare : « L’intérêt gouvernemental a été l’un des principaux facteurs ayant favorisé l’essor du sport féminin. En effet, le colonialisme britannique à Aden a accordé une grande importance au sport féminin et a encouragé la participation des femmes à diverses activités sportives. Ce soutien a joué un rôle crucial dans la naissance et le développement du sport féminin ».

Elle explique également qu’après les révolutions qu’a connues le pays à cette époque, certaines organisations et clubs ont contribué au développement du sport féminin. Leur soutien ne s’est pas limité à encourager les hommes à participer aux activités sportives, mais a également inclus les femmes.

« Dans le temps, le sport féminin au Yémen a connu un déclin significatif au cours des périodes récentes, malgré la présence de nombreuses athlètes et administratrices yéménites distinguées qui ont participé à divers événements internationaux et arabes. Cela est principalement dû à la négligence des autorités concernées envers le sport féminin et à une vision étroite qui limitait la participation des femmes à des domaines restreints, sans permettre son développement plus large. Cette mentalité a eu un impact négatif sur le niveau de participation des femmes dans divers domaines sportifs », clarifie Donia Farhan.

Elle souligne que le recul du sport féminin au cours des dernières années est dû au désintérêt croissant des clubs pour le sport féminin, ce qui a conduit à une diminution du nombre de joueuses. De plus, des normes sociales ont été renforcées qui s’opposent à la participation des femmes au sport et à leur présence lors d’événements extérieurs, ainsi qu’à leur port de vêtements sportifs.

Elle ajoute également : « Malgré les efforts actuels du ministère de la Jeunesse et des Sports pour revitaliser le sport féminin en organisant des tournois locaux dans diverses disciplines telles que les échecs, le tennis et certaines disciplines d’athlétisme, ces participations restent limitées et sporadiques, ne parvenant pas à atteindre le niveau des compétitions internationales qui étaient courantes par le passé ».

Donia insiste sur la nécessité d’une mobilisation concertée de tous les acteurs concernés, du ministère de la Jeunesse et des Sports, à la Fédération sportive, en passant par les familles, la société, les clubs et les structures dédiées au sport, afin de soutenir la femme yéménite dans le domaine sportif et lui permettre de pratiquer tous les types de sports, au niveau local comme international.

 

Un aperçu historique

Le livre « L’Association Sportive d’Aden 1934-1967 », écrit par Mohammed Abdo Ali, met en lumière une période dorée de l’histoire du sport au Yémen. Le livre explore les diverses activités sportives de cette époque, incluant le football, le hockey, le tennis sur terre battue, et d’autres jeux.

Le livre révèle la fondation de l’Association sportive d’Aden en 1934, devenant ainsi la première administration sportive de la péninsule arabique, contribuant de manière significative à l’organisation et au développement du sport dans la région.

Le livre illustre la diffusion des sports dans les écoles publiques et privées dans les années 1930, incluant l’athlétisme, le football, le cricket, le tennis, le hockey, le volleyball et le tennis de table.

Aden a également vu l’émergence du sport féminin dès les années 1940, encouragé par l’intérêt des écoles et le soutien de la société, devenant ainsi un parcours rempli de réalisations aux niveaux local, arabe et international, selon le livre « Les clubs sportifs d’Aden… Leur création et leur histoire » de l’auteur Ahmed Mohsen Ahmed.

Au début des années 1960, la personnalité éminente d’Aden, Fawzia Ghanem, a contribué à introduire le basketball à l’École préparatoire de Cratère pour filles, constituant une étape importante dans la diversification des sports accessibles aux jeunes filles.

En 1975, Nawal Qassem Saif, la personnalité sportive connue dans le monde arabe, a été chargée de fonder la Fédération de volleyball à Aden, qui a inclus des femmes parmi ses membres. Nawal en a ensuite assumé la présidence après la fondation. Les femmes du sud du Yémen ont également pratiqué de nombreux autres sports, comme le tennis, le tennis de table, le football, le basketball, les arts martiaux comme le taekwondo, ainsi que les sports d’esprit comme les échecs.

Le livre mentionne également que les réalisations du sport féminin à Aden ne se sont pas limitées au niveau local, mais se sont étendues à des participations remarquables dans des compétitions sportives arabes et internationales. En 1973, des femmes du sud du Yémen ont participé au Championnat des Trois Continents de tennis de table en République de Chine. De même, des concurrentes ont participé au Championnat international d’échecs en 1975, organisé en Libye, et l’une d’entre elles a remporté une médaille de bronze.

Les succès du sport féminin ont perduré, faisant émerger de nouveaux noms et de nouvelles réussites pour les femmes qui ont pénétré le secteur sportif au Yémen. Elles ont ainsi poursuivi le chemin tracé par les pionnières, ouvrant la voie à d’autres pour s’aventurer dans un domaine longtemps considéré comme réservé aux hommes.

Les sources du ministère de la Jeunesse et des Sports ont cité les principales figures féminines qui se sont distinguées dans le domaine du sport féminin au Yémen, parmi lesquelles figurent : Khairiya Abdelwasea, Faiza Abdelraqib, Nawal Qassem Saif, Nadia Ahmed Youssef, Fatima Mohammed Nasser, Loay Faisal Sabri, Asmaa Ahmed Saeed, Lina Faisal Sabri, Samira Abdullah, et bien d’autres encore.

 

Des efforts actuels pour le retour du sport féminin

Nadia Abdallah, vice-ministre du ministère de la Jeunesse et des Sports, souligne que le sport féminin au Yémen a un passé rempli de réalisations, les sportives yéménites ayant remporté de nombreuses médailles et trophées dans divers forums arabes et internationaux. Cela est dû aux changements positifs qu’a connus la société yéménite à cette époque, qui ont conduit à une plus grande acceptation de la participation des femmes dans le domaine sportif.

Cependant, Nadia exprime son regret concernant le déclin significatif du sport féminin au Yémen au cours des dernières années, principalement en raison de plusieurs facteurs, notamment la pénurie de ressources et les crises qui ont affecté le pays.

Elle a souligné que malgré l’existence de nombreuses associations sportives pour les jeunes, celles-ci sont actuellement inactives et n’ont pas encore retrouvé leur vitalité. Comment les clubs ou l’intérêt pour le sport féminin pourront-ils revenir dans ces conditions ? Elle a souligné l’importance de l’union de tous pour restaurer le sport féminin à son niveau d’antan, ce qui contribuerait grandement à autonomiser les femmes yéménites et renforcer leur position dans la société.

Nadia compare la situation du sport féminin au Yémen à celle du pays dans son ensemble, soulignant qu’elle a subi un déclin important en raison du conflit qui ravage le Yémen, ainsi que des dommages infligés à de nombreuses infrastructures sportives telles que les bâtiments, les stades, les clubs et les salles de sport. Elle confirme l’engagement continu du ministère à revitaliser le sport féminin dans le pays, le rétablir après des années de recul. Cela ne pourra se faire que par la fourniture d’équipements sportifs à des milliers d’écoles, la réactivation des cours d’éducation physique, et la formation des enseignantes supervisant ces cours.

Nadia continue d’expliquer les efforts déployés par le ministère pour revitaliser le sport féminin au Yémen, soulignant les importants défis auxquels ces efforts sont confrontés. Malgré cela, le ministère de la Jeunesse et des Sports reconnaît pleinement ces défis et s’efforce de les surmonter en mettant en œuvre des plans de reconstruction des infrastructures sportives détruites, avec une attention particulière à la création de salles de sport fermées pour les femmes.

Bilal Al-Hakimi, vice-directeur du Bureau de la Jeunesse et des Sports à Taïz, souligne l’engagement du Bureau à soutenir le sport féminin au Yémen et à renforcer la participation des femmes dans diverses activités sportives. Il souligne aussi que tout commence à l’école, considérée comme la clé du succès du sport féminin. Néanmoins, il existe encore d’importants défis dans ce domaine, notamment le manque d’infrastructures et d’installations sportives dédiées aux femmes et aux jeunes filles dans la plupart des régions yéménites, limitant ainsi leurs opportunités de pratique et de participation. En plus de ces défis, il y a aussi des obstacles sociaux et culturels auxquels font face les femmes et les filles qui souhaitent pratiquer le sport, tels que les attitudes négatives de certains membres de la société.

Al-Hakimi confirme cependant l’existence de certaines initiatives pionnières et de modèles positifs parmi les athlètes yéménites qui ont réussi à représenter leur pays au niveau local, régional et international. Il souligne que renforcer le sport féminin au Yémen nécessite des efforts continus à tous les niveaux, impliquant le gouvernement, le secteur privé et la société civile.

Dans le même contexte, Abdo Khameesi Kulaib Maki, directeur général du Bureau de la Jeunesse et des Sports à Al-Hodeïda, indique que le recul du sport féminin au Yémen est attribuable à plusieurs facteurs, notamment les coutumes et les traditions, les difficultés économiques – particulièrement ces dernières années -, les conditions sociales, les aspects psychologiques, et le manque d’attention adéquate de la part des autorités concernées.

Maki affirme que revitaliser le sport féminin au Yémen est une responsabilité collective, soulignant plusieurs facteurs pouvant contribuer à cette réalisation. Parmi ceux-ci : sensibiliser sur l’importance du sport féminin, organiser des séminaires, des sessions de formation et des ateliers pour les femmes afin de les encourager à pratiquer le sport et à développer leurs compétences, ainsi que la tenue d’ateliers pour discuter des défis rencontrés par le sport féminin au Yémen et des moyens pour les surmonter.

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