Par Nahed Omar Salem
Directrice générale de l’apprentissage en ligne au ministère de l’Éducation et de l’Enseignement – Aden
Conseillère en système de Département des établissements d’enseignement « ISO 21001 »
(Conseillère de l’issue de « La Femme dans les institutions gouvernementales au Yémen »
Les femmes jouent un rôle essentiel dans le développement sociétal et économique dans le monde, et leur participation au marché du travail est un facteur vital pour atteindre un développement durable et la justice sociale. Au Yémen, elles représentent une part importante de la population, mais leur participation à la main-d’œuvre – surtout au secteur public – reste en deçà des attentes ; elles font face à de grands obstacles qui affectent leur contribution efficace dans ce secteur.
Le nombre de femmes employées au secteur public est passé de 18 % en 2010 à 22 % en 2020. Leur embauche se concentre dans les secteurs de l’éducation, de la santé et des affaires sociales. Il y a également des disparités géographiques dans la répartition des femmes employées, leur proportion étant plus élevée dans les grandes villes que dans les zones rurales.
La participation des femmes au secteur public est une nécessité absolue pour atteindre un développement durable à tous les niveaux. Cela passe par l’offre d’opportunités égales aux femmes pour participer au travail public, et les habiliter à construire des sociétés plus justes et prospères, ainsi qu’un meilleur avenir pour les générations à venir.
L’importance de la participation des femmes au secteur public
L’autonomisation des femmes et le renforcement de leur participation à la main-d’œuvre sont un élément essentiel du développement durable, de la cohésion sociale et de la construction de la paix au Yémen, car les femmes yéménites ont un potentiel énorme qui contribue efficacement à la construction d’une société prospère et d’un pays sûr et stable. Les avantages de l’autonomisation des femmes comprennent la stimulation du développement économique, par le biais de l’augmentation de la productivité et de la croissance économique, de la création de nouveaux emplois et de l’amélioration du niveau de vie. Cela renforce également la cohésion sociale et la justice sociale, crée un environnement plus inclusif et ouvert, et active leur rôle de manière efficace dans la résolution des conflits et la construction de la paix, à travers leur participation aux processus de négociation, de maintien de la paix et de justice transitionnelle.
La participation des femmes au secteur public revêt une importance cruciale pour de nombreuses raisons ; il s’agit d’une étape cruciale pour parvenir à un développement durable à différents niveaux. Voici quelques-unes de ces raisons :
– Renforcer l’égalité entre les deux sexes, un objectif clé du développement durable, car la participation des femmes au secteur public contribue à promouvoir l’égalité des sexes et l’égalité des chances, et à assurer une représentation équitable des femmes à différents niveaux de prise de décision.
– Tirer parti des capacités et des compétences que possèdent les femmes et qui peuvent contribuer de manière significative au développement du travail public et à l’amélioration de la qualité des services fournis aux citoyens.
– Stimuler la croissance économique. En effet, la participation des femmes au marché du travail augmente la main-d’œuvre totale, ce qui renforce la croissance économique et contribue à la réalisation d’un développement global. Les femmes sont un élément essentiel dans le développement du capital humain, et l’investissement dans leurs capacités contribue à la réalisation d’un développement durable à long terme.
– Diversifier les opinions et les perspectives. La présence des femmes dans les postes de prise de décision ajoute de la diversité dans les opinions, ce qui conduit à des décisions plus inclusives et équitables. La participation des femmes au secteur public aide à diversifier les idées et les expériences, et contribue à améliorer la qualité des services publics fournis aux citoyens.
– Développer les politiques publiques axées sur les femmes ; car leur participation apporte des questions et des préoccupations particulières qui peuvent conduire à l’élaboration de politiques et de programmes gouvernementaux qui répondent aux besoins de tous les segments de la société.
– Représenter un modèle et un exemple pour les générations à venir, ce qui encourage davantage de femmes à poursuivre leurs ambitions professionnelles.
Cependant, un rapport du Programme des NU pour le développement (PNUD) a montré que les voix des femmes au Yémen restent largement marginalisées ; elles n’occupent que 4,1 % seulement des postes de direction et de prise de décision dans le pays, ce qui a constitué un obstacle à réaliser le développement durable au Yémen. La femme possède une compréhension unique de la vie familiale et communautaire, ce qui fait d’elle une ressource inestimable pour diriger le changement dont la société a un besoin urgent.
Les défis des femmes
Malgré l’importance et les avantages que la participation des femmes au secteur public au Yémen et leur accession à des postes de direction influents apporteraient à la société et aux institutions de l’État, les femmes continuent de faire face à d’importants défis affectant leurs contributions efficaces dans ce secteur. Parmi ces défis :
- La discrimination de genre : La femme yéménite souffre d’une discrimination de genre évidente dans l’emploi et la promotion ; les hommes sont souvent préférés aux femmes pour de nombreux emplois et postes de direction.
- La perception de la société : La perception négative de la société continue d’entraver la participation des femmes au secteur public. Certaines personnes considèrent encore que la place de la femme est à la maison et non au travail, ce qui affecte la confiance de la femme en elle-même et son désir de progresser dans son travail.
- Les défis sécuritaires et sociaux : Les femmes au Yémen font face à des défis sécuritaires et sociaux qui rendent difficile pour elles de travailler dans certaines régions et postes, et limitent leur mobilité, d’autant plus que le travail public au Yémen fonctionne encore avec des outils et des procédures de travail obsolètes.
- Les défis institutionnels : Comme la faiblesse de la représentation des femmes dans les postes de direction et de supervision ; une grande partie du travail institutionnel s’est en effet déplacée vers les soirées de qat (une plante à mâcher), traditionnellement réservées aux hommes au Yémen, ce qui a limité l’autonomisation des femmes et leur a fait perdre confiance.
- Le manque d’orientation et de soutien professionnel : De nombreuses femmes manquent de programmes d’orientation et de soutien professionnel, ainsi que de connaissances sur les droits liés à l’emploi, ce qui entrave leur développement professionnel et leurs chances d’avancement.
- L’infrastructure et l’environnement approprié : Le manque d’infrastructures et de services tels que les crèches et les politiques de soutien aux mères qui travaillent fait qu’il est difficile pour les femmes de concilier travail et vie familiale.
De plus, la femme yéménite souffre d’un manque de capacités techniques et d’expérience ; elle manque souvent des compétences et de l’expérience nécessaires pour réussir dans l’environnement des affaires, surtout dans les domaines techniques et avancés, en raison du manque d’opportunités d’éducation et de formation qui lui sont offertes, ainsi que du manque de soutien. Elle ne bénéficie pas non plus d’un soutien suffisant de la part de la société, du gouvernement et des organisations non gouvernementales, que ce soit sur le plan financier, technique ou moral.
Alors que la plupart des organisations non gouvernementales consacrent leurs budgets et leurs plans aux activités d’aide humanitaire, elles négligent de soutenir l’autonomisation économique des femmes dans les différents domaines et secteurs gouvernementaux. En plus de ces défis, les femmes ont d’autres défis tels que l’impact des conflits persistants, l’insécurité, la pauvreté et les déplacements, entre autres, qui entravent grandement leur participation et leur développement dans le travail gouvernemental.
Des recommandations et traitements
Pour relever ces défis et renforcer la participation des femmes au travail public au Yémen, les recommandations suivantes doivent être prises en compte :
- Renforcer les politiques de soutien à l’égalité, en mettant en œuvre et en activant des politiques claires visant à promouvoir l’égalité de deux sexes à tous les stades du recrutement et de la promotion.
- Combler l’écart salarial, en prenant des mesures concrètes pour garantir l’égalité des salaires entre les hommes et les femmes occupant les mêmes postes.
- Encourager les femmes à occuper des postes de direction, en proposant par exemple des programmes de formation et d’orientation spécialement conçus pour les femmes afin de les préparer et de les habiliter à occuper des postes de direction.
- Améliorer les infrastructures ; il est nécessaire de développer les infrastructures et les services de soutien, tels que les politiques de travail flexibles et les crèches, pour soutenir les femmes actives.
- Renforcer la sécurité et la stabilité, en œuvrant à l’amélioration des conditions de sécurité, sociales et économiques au Yémen afin de fournir un environnement sûr pour les femmes travaillant au secteur public.
- Soutenir et renforcer la participation des femmes à la prise de décision et à l’élaboration des politiques gouvernementales.
Le soutien de la participation des femmes au travail public au Yémen est une étape décisive vers le développement durable et le progrès social ; cela permettra d’équilibrer la représentation des hommes et des femmes au sein du gouvernement, aux postes de direction et de supervision. Les femmes ont prouvé dans le monde entier – et au Yémen en particulier – leur capacité à diriger le changement, à réaliser la justice et l’égalité, et ont contribué de manière efficace à renforcer le progrès économique, social et sécuritaire des sociétés.