Hebah Mohammed – La Femme dans le Développement et la Paix
Malgré les conflits et les défis persistants au Yémen, il y a une force motrice et dynamique représentée par la voix de la femme yéménite à la diaspora, loin de la patrie troublée. La femme yéménite en exil occupe une position centrale dans les efforts de construction de la paix et de la réconciliation nationale.
La femme forte ne se contente pas de simplement élever la voix pour appeler à la paix, mais travaille activement à abattre les obstacles entravant le processus de changement et de transformation, à travers des initiatives communautaires innovantes et des réseaux de solidarité transfrontaliers. Elle a également la capacité de redessiner la feuille de route vers la réconciliation et la stabilité.
L’importance de construire la paix au Yémen
La construction de la paix apparaît comme une clé essentielle pour restaurer la stabilité et réaliser un développement durable au Yémen, ce pays ancestral qui souffre des effets des multiples conflits et divisions ; il a aujourd’hui plus que jamais besoin d’efforts unifiés et durables pour atteindre la paix.
Selon Madina Adlan, militante pour la paix, : « Construire la paix au Yémen n’est pas seulement un but humanitaire, mais une exigence humaine et nationale inévitable, visant à réaliser la justice et la réconciliation, et à enraciner une culture de dialogue et de tolérance entre les citoyens de cette unique patrie. La réalisation de la paix n’incombe pas seulement aux gouvernements, mais c’est un défi qui englobe tous les membres de la société avec ses différentes classes et composantes ».
Elle souligne que la construction de la paix au Yémen représente un voyage difficile et rempli de défis, afin d’atteindre un état de justice, de prospérité et de coexistence pacifique entre tous les membres de la société.
Elle poursuit : « Dans ce contexte, le citoyen a un besoin urgent de réaliser une paix durable et une stabilité politique dans le pays, à travers lesquelles on peut atteindre la stabilité économique nécessaire à la stabilité de l’ensemble de la société. Malheureusement, à la lumière du conflit actuel, nous constatons de nombreuses restrictions des libertés et l’absence de l’État de droit, ce qui a entraîné une fragmentation de la cohésion sociale au Yémen ».
Mme. Adlan souligne que les femmes, à l’intérieur comme à l’extérieur, jouent un rôle essentiel dans le processus de paix. Les femmes à l’étranger peuvent faire entendre la voix du peuple yéménite et mettre en lumière les souffrances des femmes dans leur pays auprès des communautés dans lesquelles elles vivent, et peuvent également faire pression et se solidariser avec les femmes à l’intérieur. D’autre part, les femmes à l’intérieur du pays sont les mieux informées et les plus au fait de la situation, et leur rôle dans la promotion de la paix est donc plus important.
Elle souligne également la nécessité que la femme yéménite de la diaspora joue le rôle de médiateur entre les organisations internationales à l’étranger et les organisations locales à l’intérieur, et qu’une plateforme de communication et d’échange d’informations soit créée entre les femmes influentes à l’intérieur et à l’extérieur pour renforcer les efforts de paix.
Les femmes de la diaspora et le chemin de la paix
Dre. Amnah Mohsen Al-Abd, ambassadrice de bonne volonté et de paix mondiale, a laissé une forte empreinte dans l’autonomisation des femmes yéménites et la mise en avant de leur rôle dans le processus de paix, à travers sa participation active aux réunions et séminaires internationaux, et sa capacité à transmettre les souffrances des femmes au Yémen aux autorités compétentes.
Ses efforts ne se sont pas arrêtés là, mais se sont étendus à la formulation d’opinions et de propositions constructives pour réaliser une paix durable au Yémen. Elle a également participé à l’élaboration de la feuille de route féminine pour la paix, qui a été discutée lors des réunions organisées par les NU avec les femmes sur les questions de paix.
Dre. Amnah était également présente lors des négociations et des rencontres liées à la paix, participant activement à ces instances. En étroite collaboration avec les femmes à l’intérieur et à l’extérieur, elle a lancé l’initiative « Ensemble pour la paix » afin de contribuer à l’instauration de la paix au Yémen.
En reconnaissance de ces efforts remarquables, elle a obtenu le titre de « Ambassadrice de la paix mondiale ». En effet, elle a réussi à mettre en avant le rôle des femmes yéménites et à renforcer leur participation active au processus de paix aux niveaux local et international. Elle a également contribué au suivi des questions des femmes et à la proposition de solutions appropriées.
Il y a également une nouvelle voix puissante dans le voyage de la paix en dehors du Yémen, Leila Lutf Al-Thour, secrétaire générale adjointe du Bureau politique et des relations du Parti arabe de l’espoir, présidente de l’organisation SAM pour les droits et le développement, et une formatrice et médiatrice locale ainsi qu’une experte en négociation et résolution des conflits. Mme. Leila est devenue un symbole d’excellence et d’inspiration dans le domaine de la réalisation de la paix et des droits de l’homme, accompagnée d’un parcours rempli de sacrifices et de défis qu’elle a affrontés avec fermeté et détermination.
Elle a commencé son voyage en orientant son mouvement vers le service de la communauté et le sacrifice pour la paix au Yémen. Elle a toujours transmis la voix des citoyens défavorisés et travaillé sans relâche pour trouver des solutions à leurs conflits. Malgré les défis et les obstacles rencontrés, elle a poursuivi ses efforts pour réaliser la paix, convaincue que la participation communautaire est la base de la construction de la stabilité.
Mme. Leila s’est distinguée dans son rôle de conseillère et de médiatrice locale. En effet, elle a réussi à dynamiser le rôle de la société civile et à intégrer la voix des femmes dans les processus décisionnels en dehors et à l’intérieur du Yémen. Elle s’est efforcée de réaliser le changement à travers sa participation active aux conférences internationales et la présentation de plans stratégiques visant à renforcer la paix et la stabilité.
Dans le contexte du rôle qu’elle joue, Mme. Al-Thour dit : « On a fait des sessions pour impliquer le plus grand nombre possible de membres de la communauté, ce qui est une grande réalisation pour moi. En ce qui concerne le dossier des prisonniers, j’ai joué un rôle de premier plan en tant que conseillère ; la formule que j’ai proposée a été adoptée lors de la première opération d’échange de prisonniers. Ma formule représente un point de tournant important dans les efforts des femmes yéménites à l’étranger pour atteindre la paix ».
Elle continue : « Dans la situation actuelle, nous essayons d’intervenir en tant que médiateurs au niveau international sur le dossier des prisonniers yéménites et nous luttons de manière exceptionnelle, bien que les responsables de ce dossier ne nous aient pas accordé l’attention et la priorité nécessaires pour participer. Néanmoins, j’ai été la seule femme à participer de manière active au dossier des prisonniers et la première à travailler de manière intensive sur cette question depuis le début ».
Elle ajoute : « Nous assistons à une forte expansion de la participation de la communauté et de l’implication des femmes dans les efforts de paix ; en tant que femmes, nous avons réussi à faire entendre nos voix de manière puissante et influente. Lors de la conférence des tribus, nous avons réussi à aborder le sujet de manière efficace, mais malheureusement, le projet s’est arrêté par la suite ».
Mme. Al-Thour fait partie des fondateurs du courant national à l’étranger, qui compte parmi ses composantes les personnalités les plus importantes. C’est également l’un des courants qui veillent à ce que les femmes jouent un rôle actif dans le processus de paix.
Grâce à ses efforts dévoués sur le dossier des prisonniers et à son rôle de premier plan dans les négociations et la construction de la paix, Mme. Laila est devenue un modèle à suivre pour réussir et apporter des changements positifs. Elle porte dans son cœur une vision claire du rôle des femmes et de la société civile à construire un bon monde et plus stable.
Des personnages féminins
Les voyages et les étapes des femmes yéménites dans la diaspora sont nombreux et diversifiés, incarnés par plusieurs personnalités, dont Mona Shawqi Mohammed Luqman, fondatrice et présidente du conseil d’administration de la Fondation de la nourriture pour l’humanité (Food’humanity), une organisation pionnière dans le domaine de la sécurité alimentaire et de l’aide humanitaire. Elle est également co-fondatrice du Réseau de solidarité féminine, qui est le plus grand réseau féminin au Yémen.
Au fil des années, Mme. Mona s’est imposée comme une leader inspirante, récompensée par de nombreux prix et distinctions. En 2019, elle a reçu le 8e Prix de la Paix et des Droits de l’Homme, et en 2020, elle a obtenu la bourse « Joan Kroc » pour la Paix de l’Université de San Diego aux États-Unis.
En 2022, elle a été sélectionnée parmi six femmes influentes au niveau mondial par l’Institut américain de la paix (USIP). Puis, en 2023, elle a obtenu la Médaille Clinton pour le Courage.
Mona Luqman bénéficie d’une vaste expérience dans les forums internationaux. Elle a en effet apporté des contributions importantes aux NU, au Conseil de sécurité, au Conseil des droits de l’homme, au Sommet des femmes, au Congrès, à l’Organisation internationale pour les migrations et au Conseil économique et social des NU. Elle a également participé de manière active aux commissions d’enquête, aux comités des sanctions, à la justice et à la paix locale, à la réconciliation nationale, à la protection des civils et au suivi des violations, en plus de plaider pour les droits des victimes.
Actuellement, Mme. Luqman occupe le poste de Coordinatrice nationale pour l’inclusion et l’intégration au Bureau de l’Envoyé spécial des NU pour le Yémen. Elle poursuit ses efforts pour atteindre la paix, la justice et le développement durable dans la région.
Pendant des années de conflit, Mona Luqman a dirigé plusieurs programmes humanitaires et de développement ayant allégé les souffrances des gens et favorisé le développement durable. Elle s’est distinguée dans plusieurs domaines clés, dont la justice et la paix locales, le soutien, l’implication et le développement des jeunes leaders, la sécurité communautaire, la cohésion sociale et le rejet de la haine et de la violence, la protection des civils et le suivi des violations, la restructuration de l’action humanitaire, l’éducation des filles et la réduction du mariage des mineures, la gestion des catastrophes environnementales et du changement climatique, et la sécurité de l’eau, de l’alimentation et de l’énergie dans une approche intégrée. En plus, la protection, le soutien, l’autonomisation et l’intégration des communautés de déplacés internes.
Elle a également dirigé des groupes de dialogue communautaire dans plusieurs régions, impliquant les femmes, les jeunes et les dirigeants locaux. Cela a permis d’atténuer les tensions communautaires et de créer un espace de discussion et d’interaction. De plus, elle a contribué à former des dizaines de jeunes hommes et femmes pour qu’ils deviennent des ambassadeurs de la paix, promouvant les valeurs des droits de l’homme, de la justice sociale, de la diversité, de l’égalité de deux sexes et de la citoyenneté mondiale.
Les organisations et parties concernées
« Dans le cadre du rôle que jouent les organisations et les parties concernées pour soutenir les femmes à l’étranger, nous constatons que les organisations de la diaspora s’intéressent au rôle des femmes dans la consolidation de la paix et impliquent de manière constante les femmes dans les ateliers sur les questions de paix, en raison de la facilité de communication et de coordination avec elles », selon Mme. Adlan.
Elle ajoute : « Il y a néanmoins des défis dans la mise en œuvre de ces activités qui renforcent le rôle des femmes dans le processus de paix à l’étranger, à savoir la faiblesse du rôle de l’État et son manque d’intérêt pour ces questions, ce qui a entraîné un affaiblissement du rôle des ambassades dans le soutien aux Yéménites de la diaspora. Ici, nous pouvons affirmer que l’État doit s’engager à soutenir le rôle des femmes de la diaspora en soutenant les ambassades dans cette direction ».
Dans le même contexte, Valentina Abdelkrim, présidente par intérim de l’Union des femmes du Yémen à Aden, déclare : « Il n’y a pas de parties officielles au Yémen, dans le nord ou le sud, qui s’intéressent à renforcer le rôle des femmes, bien au contraire, on essaye de ne pas impliquer les femmes dans aucune activité, négociation ou dialogue pour la paix. Cependant, il y a un certain nombre d’organisations locales et internationales qui s’efforcent d’impliquer les femmes à l’intérieur et à l’extérieur du pays à travers la mise en œuvre d’activités et de programmes de formation, que ce soit pour les femmes des partis, des organisations ou des composantes politiques, en renforçant leurs capacités de participation et d’efforts pour construire la paix pour le Yémen ».
En ce qui concerne le rôle des parties concernée et des organisations dans le renforcement du rôle des femmes yéménites dans la construction de la paix à travers leur présence dans la diaspora, Raeda Al-Dhabhani, ambassadrice de la paix auprès de l’Organisation internationale pour la paix – ONU, affirme que le rôle des femmes dans la société yéménite est purement symbolique sans impact réel sur la réalité. En effet, les résultats restent simples, car nous n’avons par exemple pas vu de grand rôle des femmes dans la prise de décisions politiques ou la participation aux négociations, et il n’y a pas d’efforts réels de la part des organisations qui influencent complètement toutes les parties pour garantir la participation des femmes aux processus de construction de la paix.
Mona Luqman est d’accord avec elle, en disant : « Malheureusement, il n’y a actuellement aucun programme de soutien ou de protection fourni par le gouvernement yéménite aux citoyennes yéménites, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du Yémen, et malgré les efforts internationaux de plaidoyer, peu de femmes ont bénéficié d’un certain soutien à cet égard ».
Mme. Luqman espère que les efforts internationaux et locaux se conjugueront pour trouver des programmes de soutien et de protection efficaces pour les citoyennes yéménites, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du pays, car cela est d’une importance cruciale pour garantir l’accès à leurs droits fondamentaux et aux opportunités disponibles.
Le réseau de solidarité féministe et les efforts déployés
Selon la coordinatrice du réseau de solidarité des femmes, Lisa Al-Badawi, en raison des conditions politiques, des conflits et de l’insécurité, de nombreuses femmes yéménites ont dû migrer vers d’autres pays. Beaucoup d’entre elles possèdent des compétences élevées dans divers domaines tels que la politique, les droits humains et l’économie, et certaines ont même une expertise rare dans les domaines scientifiques.
Elle ajoute : « Le Yémen a un besoin crucial de ces compétences et de cette expertise. De nombreuses femmes cherchent donc à contribuer à la construction de la paix au Yémen à tous les stades, faisant des efforts considérables dans les pays où elles vivent et grâce à leurs excellentes relations avec les organisations et agences internationales, pour faire pression sur les décideurs afin de répondre rapidement aux besoins urgents au Yémen, y compris la participation des femmes ».
Elle a également indiqué que l’initiative « Voie de la paix » a élaboré une feuille de route féministe pour la paix dans le but d’exercer une pression sur les parties en conflit et les puissances internationales et régionales pour qu’elles l’adoptent. Les femmes travaillent régulièrement à son développement afin de s’assurer qu’elle intègre les nouvelles évolutions.
Elle souligne également que, dans le cadre des efforts du réseau de solidarité des femmes, l’accent est mis sur les histoires de succès et les expériences remarquables qui reflètent la force et l’impact des femmes. Elle ajoute : « Nous travaillons avec dévouement à travers ce réseau pour renforcer et autonomiser les femmes, développer leurs capacités, avec une approche de soutien et intégrée, et nous nous efforçons de soutenir les questions liées aux droits et aux femmes avec toute l’attention et la spécialisation voulues ».
Des défis complets
« L’un des principaux défis rencontrés est la marginalisation continue de la société internationale de toute personne prétendant que la société yéménite est l’acteur principal du processus de paix. Les idées sont également adoptées et mises en œuvre sans la présence de l’auteur de l’idée pendant le processus d’exécution, que ce soit dans les projets ou de manière générale. Cela nous oblige à prouver notre existence en ayant un impact plus fort et en orientant nos efforts pour convaincre la société de l’importance du rôle des femmes. J’ai remarqué que la société yéménite répond mieux aux femmes dans la promotion de la paix », selon Laila Al-Thour.
Elle continue : « Concernant les figures féminines, le défi persiste d’impliquer les femmes, seulement dans la mesure où cela correspond aux calculs des autres. En effet, la communauté internationale ne croit pas vraiment à l’activation du rôle de la société yéménite en tant que garant et observateur principal du processus de paix, ce qui nous oblige, nous les femmes, à imposer notre présence en tant que politiciennes et membres de partis. Malgré les déclarations de soutien aux femmes de la part de la communauté internationale, la réalité montre l’absence de soutien réel à cet égard, et ces déclarations restent de simples slogans ».
Mme. Al-Thour finit en disant : « Malgré ces défis, nous continuons à transmettre les souffrances des citoyens et à exiger l’implication des femmes sur la scène internationale et locale. Donc, les femmes doivent avoir un rôle actif autour de la table des négociations, et la communauté internationale doit soutenir cela de manière effective et sanctionner toute partie qui le refuse. Cela encouragera la promotion et la réalisation de la paix ».