Hebah Mohammed – La Femme dans le Développement et la Paix

 

Dans un monde plein de contradictions sociales et culturelles, le phénomène du célibat est un sujet controversé et intéressant, surtout lorsqu’il s’agit de comparer la vie à la ville et à la campagne. La ville représente une porte ouverte sur des changements économiques et sociaux rapides, tandis que la campagne conserve son originalité et ses traditions qui jouent un rôle important à former les valeurs de la société.

En ville, les femmes subissent des pressions socio-économiques qui font du célibat un choix courant, notamment le coût élevé de la vie et les défis liés au travail et à l’emploi. De plus, les ambitions personnelles et professionnelles croissantes peuvent faire passer le mariage au second plan pour certaines d’entre elles.

Amina Aboud, militante communautaire et habitante de la campagne, dit : « Le célibat à la campagne fait face à des défis uniques, car l’environnement social traditionnel prédomine, rendant le mariage non seulement une étape personnelle, mais aussi une étape sociale importante. Bien que les coûts du mariage puissent être moins élevés à la campagne, les interactions sociales et les valeurs traditionnelles restent les facteurs clés qui poussent les jeunes vers le mariage ».

En comparant le célibat en milieu urbain et rural au Yémen, il est clair que les facteurs économiques et sociaux jouent un rôle essentiel dans les décisions de mariage. Chaque environnement présente des défis et des opportunités uniques pour les jeunes, ce qui reflète des différences notables dans leur perception du mariage et de ses effets sociaux.

Dre. Iman Abdelmalek Bassid, professeure de service social à l’Université d’Almustakbal, estime que le taux de célibat à la campagne est beaucoup plus faible qu’en ville. Cela s’explique par le fait que les filles à la campagne sont considérées comme plus capables de prendre des responsabilités et de s’adapter à différentes conditions, ce qui les rend plus attractives pour les jeunes. En revanche, les filles en ville sont perçues comme moins prêtes à faire face aux défis et aux circonstances difficiles, ce qui influence les décisions de mariage dans les deux environnements.

Elle ajoute : « Cependant, au cours de la dernière décennie de conflit, les données sociales ont révélé une réalité différente ; elles ont prouvé que la vie en ville est devenue plus difficile que la vie à la campagne, en raison de la hausse des prix des loyers et de l’interruption des services d’électricité et d’eau. En revanche, l’eau est disponible à la campagne grâce aux sources et aux terres agricoles, ce qui rend le coût de la vie à la campagne moins élevé ».

Elle a expliqué que le coût de la vie en ville a considérablement augmenté, ce qui a poussé de nombreuses familles à déménager à la campagne et à faire louer leurs maisons pour garantir la satisfaction de leurs besoins. De plus, certaines coutumes et traditions modernes en ville imposent à la fille de se marier et de vivre dans sa propre maison pour éviter d’éventuels problèmes avec la famille du mari.

 

Défis dans les zones rurales

Les rapports officiels indiquent que plus de 60 % de la population yéménite vit à la campagne. Sana, une jeune femme ambitieuse ayant déménagé de la campagne vers la ville pour réaliser son rêve universitaire, évoque les défis des filles des zones rurales, en disant : « À la campagne, le choix d’un partenaire de vie ne suit pas de critères importants, le mariage est une nécessité dictée par des traditions spécifiques. En revanche, en ville, je me trouve face à de nouvelles opportunités et des objectifs plus larges ; le mariage n’est plus la seule solution pour moi ».

Pour sa part, Nabila, quarante ans, enseignante dans une école à Ibb, dit : « Le célibat à la campagne a connu une augmentation significative ces dernières années ; de nombreuses filles refusent le mariage précoce et préfèrent poursuivre leurs études universitaires. La femme rurale est devenue plus consciente qu’auparavant et vise à s’affirmer d’abord avant de penser au mariage, considérant cela comme une part qui viendra en temps voulu ».

 

Le fossé du mariage entre la campagne et la ville

L’écart de mariage entre la campagne et la ville comprend un ensemble de facteurs sociaux, économiques et culturels qui influencent les choix de mariage et leur temps. Les normes culturelles et les traditions exercent une influence plus forte dans la société rurale, où le mariage est perçu comme une étape nécessaire et l’un des devoirs sociaux les plus importants. En revanche, dans les villes, il y a une ouverture accrue à des options multiples, y compris l’éducation et le travail.

Les opportunités économiques sont également des facteurs influents, ce qui peut conduire à un report du mariage pour les filles et les jeunes qui cherchent à atteindre leur indépendance financière. En revanche, les options économiques à la campagne peuvent être limitées, rendant le mariage une option plus rapide. Les villes connaissent une prise de conscience croissante des femmes concernant leurs droits et leur indépendance, ce qui peut les inciter à retarder le mariage, tandis qu’à la campagne, il peut y avoir une pression plus forte pour se conformer aux normes sociales. En ce qui concerne l’écart d’âge, le mariage à un jeune âge est souvent préféré à la campagne, tandis que dans les villes, le pourcentage de personnes préférant attendre d’avoir terminé leurs études et d’être financièrement stables augmente.

Amal Baqreen, chercheuse sociale, déclare : « Les différences concernant le mariage entre les jeunes de la ville et de la campagne se manifestent clairement à la campagne, où les parents prennent en charge la demande en mariage et le mariage de leurs enfants, ce qui pousse les jeunes à se marier plus tôt, entraînant un rapprochement des âges entre époux et enfants, et réduisant le taux de célibat ».

Elle a ajouté : « Les coutumes et les traditions jouent un rôle important dans la variation des taux de mariage entre la campagne et les villes. Par exemple, à la campagne, le mariage est souvent traditionnel ; un jeune se marie avec quelqu’un de sa famille, et le mariage a souvent lieu à un âge précoce tant pour les filles que pour les garçons. Un jeune peut même se marier tout en étant encore à l’école, car les villages ont des liens sociaux forts entre leurs habitants, ce qui réduit les obstacles au mariage que l’on peut rencontrer en ville ».

Elle poursuit : « En revanche, en ville, les conditions économiques jouent un grand rôle à reporter le mariage, et un jeune doit établir son propre foyer avant de se marier. Lorsqu’il décide de se marier, il choisit souvent une fille plus jeune ; beaucoup se marient à trente ans ou plus, ce qui contribue à augmenter le taux de célibat. De plus, les filles en ville préfèrent poursuivre leurs études plutôt que de se marier ».

Elle estime que cette situation nécessite l’intervention de l’État pour fournir une éducation gratuite à tous les niveaux, afin de réduire les charges financières pesant sur les jeunes, en plus de créer des opportunités d’emploi spécifiquement pour les jeunes de la ville, qui sont les plus touchés par ces conditions.

De son côté, Maha Abdelaziz, militante communautaire et habitante de la campagne, dit : « Il y a des différences dans les attitudes des jeunes concernant le mariage entre la ville et la campagne ; plusieurs facteurs jouent un rôle dans ces divergences. Les jeunes de la campagne ont tendance à choisir des filles plus jeunes pour se marier, sous l’influence des familles, en particulier des mères et des sœurs. Cela conduit parfois à des mariages de filles à un âge précoce, inférieur à 18 ans, ce qui suscite des inquiétudes quant à l’impact de ces pratiques sur leur avenir ».

Elle souligne que les taux de mariage diffèrent entre la ville et la campagne ; les villes enregistrent des taux de mariage plus élevés par rapport à la campagne. Cela s’explique par le fait que de nombreux habitants de la campagne souffrent de conditions économiques difficiles, et les familles connaissent des revenus faibles et des taux de chômage élevés. De plus, le fait que beaucoup d’entre eux ne terminent pas leurs études entraîne un manque d’opportunités d’emploi, ce qui affecte négativement leur capacité à se marier au bon moment.

Anwar Ahmed, jeune fille de la campagne, partage cet avis, en soulignant que le phénomène du célibat apparaît de manière plus marquée dans la campagne en raison de la nature interconnectée et réduite de la communauté rurale ; tout le monde se connaît, ce qui rend les situations des filles non mariées ou divorcées évidentes et connues de tous.

 

Variation des coûts

Mme. Amina Aboud a affirmé que le phénomène du célibat est plus faible dans les zones rurales que dans les villes. Cela est dû à plusieurs facteurs, surtout la baisse de la valeur des dots, le faible coût des mariages par rapport à la ville, ainsi que l’existence d’initiatives sociales qui obligent à payer des montants spécifiques pour les enfants du même village.

Elle a souligné que les taux de mariage dans les zones rurales sont plus élevés que dans les villes, pour plusieurs raisons. L’une des principales raisons est que les jeunes à la campagne se marient souvent avant d’avoir terminé leurs études dans de nombreux cas ; les parents assument la responsabilité du mariage de leurs enfants, ce qui permet au jeune de vivre avec sa famille. Cela facilite la poursuite de ses études et la recherche d’un emploi après le mariage, contribuant ainsi à augmenter les taux de mariage dans les zones rurales.

Elle a expliqué que les jeunes en ville font face à de grands défis qui rendent le mariage difficile. Souvent, un jeune doit terminer ses études et travailler pour être en mesure de subvenir à ses besoins avant de décider de se marier. Il assume la responsabilité du mariage seul, et la majorité de la population souffre de conditions économiques difficiles, ce qui pousse certains à travailler dès leur jeune âge pour couvrir les frais de scolarité.

Zahra Faraj, militante communautaire, affirme qu’à la campagne, le mariage est simple et accessible, ce qui n’est pas comparable à la ville. La cérémonie de mariage a lieu chez le chef du village ou chez un voisin, sans frais pour le marié, et la mariée peut vivre dans la maison de la famille du marié sans avoir besoin d’un logement séparé comme c’est le cas en ville. Cela reflète le désir de la plupart des habitants de la campagne de se concentrer sur la moralité du marié et le respect des traditions, sans tenir compte de sa richesse financière. De plus, il y a un plafond de coûts spécifique à chaque village ou famille, mais les coûts peuvent augmenter si le marié vient d’en dehors du village.

Il est constaté que les taux de mariage diffèrent entre la ville et la campagne, mais l’absence de statistiques officielles précises rend difficile la présentation d’une image claire et fiable concernant les différences dans les taux de mariage ou de célibat entre les deux. Donc, l’estimation des niveaux de célibat dans les villes par rapport à la campagne repose sur des opinions et des expériences individuelles, et non sur des données fiables. Cette absence de statistiques ouvre la porte à des interprétations et des opinions qui peuvent être biaisées ou inexactes, rendant ainsi la compréhension du phénomène d’une manière scientifique complexe.